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L'Arbre de l'Avent
Plaqueminier, Diospyros kaki, famille des Ébénacées
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Début Novembre, en arrivant chez moi au village, je me suis comme d'habitude précipité sur la terrasse pour saluer la montagne et inspecter les jardins. L'arbre de mes voisins m'a tout de suite sauté dessus. C'est un grand plaqueminier âgé d'une bonne trentaine d'années, un peu coincé sur le côté de leur maison, sobre et discret tout au long de l'année, et qui à l'approche de l'hiver se transforme en arbre de Noël. Plus une feuille, et des centaines de grosses boules oranges et voraces de lumière. Cette année, alors que toute la flore marquait un retard de plusieurs semaines depuis un printemps tardif, lui était précoce, généreux, exubérant comme un miracle d'abondance. La beauté de cet arbre attendant la neige et le froid avec ses altières décorations fluorescentes et nourricières m'émut beaucoup.
Il était très maternel, et j'en avais besoin. -
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Alors que je m'en fous (aussi) de photographier un arbre devant une maison, parfois, selon les heures et leurs lumières, je faisais une photo de lui, comme ça pour rien, juste parce que c'était magnifique et comme pour me le montrer à moi même ou ne jamais l'oublier. Et puis 3 jours avant de repartir, mes jambes ont escaladé la clôture, et pendant une heure infinie et indéfinie, j'ai fait plein de photos de lui, dans un état de semi inconscience, tout en me gavant de kakis juteux que je pressais pour en gober la chair orange et translucide qui sortait du trou déchiré comme de la pâte à chichi un peu molle de sa machine sur un stand de foire. Aucune astringence ; la pulpe baveuse et sucrée s'enfonçait dans la gorge avec un goût de reviens-y simultanément délicat et pénétrant. Il faisait doux, mais le ciel était couleur de neige, un gris clair presque blanc qui rendait les fruits plus lumineux que la lumière. Un milan royal tournait à 25 mètres au dessus de l'arbre et surveillait nos ébats. C'était le Dimanche premier Décembre 2013, le jour de l'Avent...