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La Mort
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Bannières de procession, reliques et dalles funéraires en Haute Corse.
(le cygne était sur une plage en Islande) -
La Mort en Corse, de l'âge de fer à l'an 2000 !
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Au cimetière de Pázmandfálu, Hongrie.
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Couvent des Capucins à Palerme. Ces galeries ont été aménagées à partir de 1599. Destinées à l'origine aux moines, elles ont été par la suite ouverte à l'élite de la ville, ce qui permetait aux religieux de récolter de l'argent. 8000 cadavres embaumés en costume d'époque cohabitent répartis selon leur catégorie sociale, sexe ou profession. On effectuait sur les corps un processus de déshydratation, avant de les laver au vinaigre. Après huit à douze mois d'attente, certains étaient enbaumés alors que d'autres étaient enfermés et scellés dans des cabines de verre.
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Mais je crains pas tellement ce lugubre imbécile
qui viendra me cueillir au bout de son curdent
lorsque vaincu j'aurai d'un œil vague et placide
cédé tout mon courage aux rongeurs du présent.Raymond Queneau, "L'Instant fatal"
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Bannière de procession, San Nicolao, Haute Corse
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Nemini Parco ( Je n’épargne personne )
J’voudrais m’taper la belle faucheuse
C’est mon côté goudou gothique
Et embrasser sa bouche rieuse
Même si c’est pas très catholiqueJ’voudrais serrer la ténébreuse
Sur une litière plutôt rustique
J’voudrais enfouir sa masse osseuse
Et fourrer son sourire lubriqueJ’voudrais baiser ses orbites creuses
J’voudrais bouriner cette bourrique
Et dans une ronde vertueuse
Offrir mon âme d’hérétiqueJe la renifle doucement
Consentante et le reste
Je la goûte tendrement
Envoûtante et digesteTout son corps est musique
Son crâne déraisonne
Elle sonne anal-logique
Un xylophone en calciumSa silhouette aguicheuse
Son squelette mélodique
Ses muqueuses mystérieuses
La Mort est angéliqueJ’voudrais me faire ce reliquaire
Sur un cantique frénétique
J’voudrais lécher l’absence de chair
De son bassin impudiqueJ’voudrais remplacer ses ovaires
Par mes deux yeux extatiques
J’voudrais m’embourber cet ossuaire
Mais de façon scientifiqueJ’voudrais mourir intra mortem
De cette copulation mortelle
J’voudrais mourir parce que je l’aime
Parce que la mort est immortelle -
Petite Danse Funèbre
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Comme le fruit se fond en jouissance,
Comme en délice il change son absence
Dans une bouche où sa forme se meurt (…)Rainer Maria Rilke
Cathédrale de Lecce, Italie.
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Cyphose d'un enfant de 13 ans.
Narrenturm, Vienne -
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Le Mort Joyeux
Dans une terre grasse et pleine d’escargots
Je veux creuser moi-même une fosse profonde,
Où je puisse à loisir étaler mes vieux os
Et dormir dans l’oubli comme un requin dans l’onde.Je hais les testaments et je hais les tombeaux ;
Plutôt que d’implorer une larme du monde,
Vivant, j’aimerais mieux inviter les corbeaux
À saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.Ô vers ! noirs compagnons sans oreille et sans yeux,
Voyez venir à vous un mort libre et joyeux ;
Philosophes viveurs, fils de la pourriture,
À travers ma ruine allez donc sans remords,
Et dites-moi s’il est encore quelque torture
Pour ce vieux corps sans âme et mort parmi les morts ?Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1857
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"Nous ne mourons pas, c'est le monde qui nous quitte"
Edvard Munch, carnet de croquis, 1930-1935 -
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Félix Bracquemond, 2ème & 3ème états du projt de frontispice des Fleurs du Mal.
1860, Gravures sur cuivre.
Ces images ont été violament refusées par Baudelaire.En dessous, frontispice de Félicien Rops réalisé en 1866 pour le recueil de poème "Les Épaves" de Charles Baudelaire.
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Ossuaire de Sedlec à Kutná Hora en république Tchèque
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Archiconfrérie de la Mort à Oria en Italie. Ce sont des volontaires partis se battre contre les Turcs à Otranto en 1481 et momifiés pour leur rendre gloire. Le défunts était éviscéré, le cerveau aspiré par le nez et le corp rempli de chaux et de sel.
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Quand je mourrai, ce soir peut-être,
Je n'ai pas de jour préféré,
Si je voulais, je suis le maître,
Mais... ce serait mal me connaître,
N'importe, enfin, quand je mourrai.Mes chers amis, qu'on me promette
De laisser le bois... au lapin,
Et, s'il vous plaît, qu'on ne me mette
Pas, comme une simple allumette,
Dans une boîte de sapin ;Ni, comme un hareng, dans sa tonne ;
Ne me couchez pas tout du long,
Pour le coup de fusil qui tonne,
Dans la bière qu'on capitonne
Sous sa couverture de plomb.Car, je ne veux rien, je vous jure ;
Pas de cercueil ; quant au tombeau,
J'y ferais mauvaise figure,
Je suis peu fait pour la sculpture,
Je le refuse, fût-il beau.Mon voeu jusque-là ne se hausse ;
Ça me laisserait des remords,
Je vous dis (ma voix n'est pas fausse) :
Je ne veux pas même la fosse,
Où sont les lions et les morts.Je ne suis ni puissant ni riche,
Je ne suis rien que le toutou,
Que le toutou de ma Niniche ;
Je ne suis que le vieux caniche
De tous les gens de n'importe où.Je ne veux pas que l'on m'enferre
Ni qu'on m'enmarbre, non, je veux
Tout simplement que l'on m'enterre,
En faisant un trou... dans ma Mère,
C'est le plus ardent de mes voeux.Moi, l'enterrement qui m'enlève,
C'est un enterrement d'un sou,
Je trouve ça chic ! Oui, mon rêve,
C'est de pourrir, comme une fève ;
Et, maintenant, je vais dire où.Eh ! pardieu ! c'est au cimetière
Près d'un ruisseau (prononcez l'Ar),
Du beau village de Pourrière
De qui j'implore une prière,
Oui, c'est bien à Pourrières, Var.Croisez-moi les mains sous la tête,
Qu'on laisse mon oeil gauche ouvert ;
Alors ma paix sera complète,
Vraiment je me fais une fête
D'être enfoui comme un pois vert.Creusez-moi mon trou dans la terre,
Sous la bière, au fond du caveau,
Où tout à côté de son père,
Dort déjà ma petite mère,
Madame Augustine Nouveau.Puis... comblez-moi de terre... fine,
Sur moi, replacez le cercueil ;
Que comme avant dorme Augustine !
Nous dormirons bien, j'imagine,
Fût-ce en ne dormant... que d'un oeil.Et... retournez-la sur le ventre,
Car, il ne faut oublier rien,
Pour qu'en son regard le mien entre,
Nous serons deux tigres dans l'antre
Mais deux tigres qui s'aiment bien.Je serai donc avec les Femmes
Qui m'ont fait et qui m'ont reçu,
Bonnes et respectables Dames,
Dont l'une sans coeur et sans flammes
Pour le fruit qu'elles ont conçu.Ah ! comme je vais bien m'étendre,
Avec ma mère sur mon nez.
Comme je vais pouvoir lui rendre
Les baisers qu'en mon âge tendre
Elle ne m'a jamais donnés.Paix au caveau ! Murez la porte !
Je ressuscite, au dernier jour.
Entre mes bras je prends la Morte,
Je m'élève d'une aile forte,
Nous montons au ciel dans l'Amour.Un point... important... qui m'importe,
Pour vous ça doit vous être égal,
Je ne veux pas que l'on m'emporte
Dans des habits d'aucune sorte,
Fût-ce un habit de carnaval.Pas de suaire en toile bise...
Tiens ! c'est presque un vers de Gautier ;
Pas de linceul, pas de chemise ;
Puisqu'il faut que je vous le dise,
Nu, tout nu, mais nu tout entier.Comme sans fourreau la rapière,
Comme sans gant du tout la main,
Nu comme un ver sous ma paupière,
Et qu'on ne grave sur leur pierre,
Qu'un nom, un mot, un seul, GERMAIN.Fou de corps, fou d'esprit, fou d'âme,
De coeur, si l'on veut de cerveau,
J'ai fait mon testament, Madame ;
Qu'il reste entre vos mains de femme,
Dûment signé : GERMAIN NOUVEAU.Germain Nouveau, "Dernier madrigal", extrait de "Valentine et autres vers"
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Cimetière de Loco Rotondo, Pouilles, Italie.
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J’aime les gens. J’aime les gens, mais dans la vie quotidienne ils ne se laissent pas souvent faire. Il y en a (les Américains) qui ont une voix tellement affreuse qu’on rendrait service à l’humanité en leur coupant le son (ou la tête). Il y en a qui s’habillent en vert fluo pour nous faire croire que la cécité est une vertu. Il y a des gros cons, des mesquins, des fourbes, des prétentieux, et on n’a pas toujours le temps de se demander quelle souffrance les habite et de leur faire un câlin. Il y a aussi les banquiers, la police, les curés et les fachos qui sont là pour nous faire grandir et repousser les limites de l’impossible. Ils se sacrifient au service de notre étroite empathie, et pourtant j’avoue avoir parfois du mal à laisser s’épanouir ma reconnaissance et ma gratitude.
J’aime les gens. Tous, les vieux, les bébés, les rouges, les ultra-rouges, les noirs, les bleus, les LGBT+, les moins que rien et les plus qu’humain. J’aime les femmes, les extras terrestres, les magdaléniens, les malades et les poètes, j’aime les regards, les histoires, les destins.
Au cimetière je regarde tous ces visages, et rien ne vient me marginaliser. Je peux les aimer autant que je veux, on est de la même espèce, de la même famille, on est beau. Je ne regarde pas les noms ni les dates, que les visages. Ils me racontent une histoire, qui m’appartient surement, mais je l’ignore… Parfois la photo m’interroge, un instantané pour l’éternité. Pour qui ? Pourquoi ? Est-ce la personne qui l’a choisie, voulue, ou bien ses proches…
J’aime les gens, trop parfois, et certaines photos me traumatisent, notamment presque tous les enfants. J’ai appris à détourner mon regard en une infime fraction de seconde sans que l’image pénètre mon cerveau. Á l’inverse, je reviens souvent sur mes pas contempler une personne que mes yeux avaient classé glissante, insignifiante, et je m’applique à réparer ce jugement stupide (comme tous les jugements d’ailleurs) et à la dévisager avec tendresse.
Aussi intervient fortement dans cette heureuse déambulation chez les « miens » la qualité des photos. Les techniques photographiques de 1880 à 1950 ont une grâce malheureusement disparue. Il y a de l’humanité, de la profondeur, une rencontre. Même l’usure des supports ou de l’image est bavarde et participe aux émotions. On reçoit de ces portraits comme une part de vérité, mais pudique et pleine de dignité..
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Cimetière de Scicli en Sicile ...
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Au cimetière de Syracuse ...
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Un peu partout en Sicile et Italie du Sud...
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La couronne d'une personne, de personne !?
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